Aspirianus Romanes (aujourd’hui nommée Aspiran de Ravanès), une villa gallo-romaine chargée d’Histoire. Un lieu de bataille et de conquête. Un site archéologique reconnu. Un domaine viticole aux vins qualitatifs et variés.
En 1955, Félix Benin achète le Domaine de Ravanès et y installe son fils, Guy, qui apprend le métier de viticulteur sur le terrain pendant près d’une quinzaine d’année. Très curieux et aventureux, il plante des cépages (notamment bordelais) avec l’obsession de créer un grand vin de garde du Languedoc et fini par se faire un nom comme producteur de vin de cépage.
Même si la famille Benin nage dans le monde viticole, par le courtage du vin en Algérie française, Guy Benin est considéré comme la première génération de vignerons de la famille. C’est alors que Marc, fils de Guy, né en Algérie en 1959, fait son entrée sur le domaine en 1987 avec son diplôme de Docteur en Oenologie-Ampélologie de l’Université de Bordeaux en poche.
Lui qui se destinait à une vie universitaire dans la recherche après de longues études, attrape la fièvre vigneronne et rejoint son père pour le soutenir et apposer sa patte dans la belle aventure du grand vin au Domaine de Ravanès. Ses études sur la génétique de la vigne ainsi que sur les cépages bourguignons (Pinot Noir, Chardonnay, Gamay) et son œil nouveau seront un atout de taille et permettront la création de nouvelles cuvées au Domaine, notamment leur cuvée phare Les Gravières du Taurou crée en 1998, le Prime Verd en 1997 et le Renard Blanc en 2003. Aujourd’hui sont fils cadet Axel, titulaire d’un BTS Viti-Oeno et d’une expérience de vinification en Nouvelle Zélande, a rejoint son père à la production en 2015 et David, le second fils de Marc, après son Ecole de Commerce à Paris, puis une solide expérience au sein d’une grosse agence parisienne où il a développé les ventes du domaine, a pris en main en soutien de son père, la commercialisation des vins du domaine pour la France depuis 2 ans.
« Quand je suis revenu ici, j’ai réalisé qu’il y avait un sacré potentiel. L’avantage dans l’appellation « vins de pays », c’est que l’on peut être créatif : on a beaucoup de cépages à notre disposition, et on n’est pas enfermé dans le carcan d’un encépagement imposé.
Aujourd’hui ce qui est caractéristique des AOP du Languedoc, ce sont les cépages dominants syrah, grenache et mourvèdre. Mais chaque identité du « nouveau » terroir languedocien après l’eldorado du vin de masse, a dû être réinventée. La typicité, ça se crée aussi ex nihilo. Dans le Languedoc on a une richesse, une variété de terroir qui permettent de faire des choses très différentes et très intéressantes d’une zone à l’autre, de faire de l’expérimentation.
J’ai pris la suite de mon père qui a été aventureux et initiateur de vins de qualité sur le domaine. Je vinifie depuis 1988 en conservant sa ligne directrice, mais j’ai aussi apporté ma pierre à l’édifice en poussant les choses encore plus loin et en créant de nouveaux vins. »
Le vignoble de Ravanès a connu très tôt l’expérience de l’agriculture biologique avec la mise en place de la méthode Lemaire-Boucher dès 1965. Cette philosophie, en laquelle Guy Benin croyait fermement, reste en place tout au long des décennies sans revendiquer de label pour rester plus libre. Aujourd’hui le Domaine de Ravanès est certifié en Agriculture Biologique depuis 2011.
Avez-vous envie de pousser plus loin votre démarche en faveur de l’environnement ? Si oui, comment ?
«Je pense qu’on a déjà atteint un niveau acceptable, mais tout est toujours améliorable. On a un potentiel de 60 hectares, on en exploite 35 car nous faisons de la jachère sur plusieurs années avant de replanter pour que nos terres se reposent. Évidemment nous réfléchissons à plusieurs autres pistes pour aller vers un développement encore plus durable. Par exemple, je travaille maintenant avec des bouchons bio-sourcés. Il y a tellement de choses. Chaque petite pierre compte pour consolider l’édifice ! »
Quel est votre cépage favori ?
« J’ai découvre beaucoup de cépages ces dernières années, j’ai le sentiment qu’il y a de grandes choses à faire avec les blancs dans cette plaine alluviale sablo-graveleuse de l’Orb. J’ai un petit faible pour le Petit Verdot parce que c’est un peu ce que j’ai amené ici. C’est fantastique. Il se plaît beaucoup dans la région, peut-être même plus qu’à Bordeaux. En situation méditerranéenne, il garde une belle acidité structurelle, il est très régulier en production. Il est très particulier, sur des notes de cassis bien mûrs. Il est difficile à cultiver mais il aime les petits rendements et c’est une merveille en sélection parcellaire. Il évolue très lentement donc en termes de garde il va être très intéressant.
En blanc, je choisirai le Grenache Gris, c’est un grand cépage. Il est vraiment adapté au Sud, et sur le domaine on peut compter sur lui. »
Et pour l’avenir, qu’envisagez-vous pour votre domaine, vos cuvées… Quels sont vos objectifs ?
« On va essayer de nouveaux cépages, développer les vins blancs, avec l’objectif du zéro traitement et de l’adaptation au réchauffement climatique. En 2019, nous avons planté du Souvignier Gris, un hybride allemand résistant au mildiou et à l’oïdium, le premier millésime, 2021, est très prometteur. En 2023, nous allons planter de l’Assyrtiko, un cépage grec originaire de Santorin qui pousse dans des conditions drastiques de stress hydrique et qui étonnamment produit un vin blanc fin, aromatique et frais. Notre cave est en perpétuelle rénovation, car c’est un domaine très ancien. Et la relève est assurée. Mon fils Axel est présent dans la cave et les vignes : on lui doit la cuvée Ibis en Blanc et Rouge. Quant à mon autre fils David, il nous a rejoint et s’occupe du côté commercial. Chacun a ses compétences, ils se complètent. Je pense qu’on va pouvoir prospérer sans crainte.»
Avez-vous une référence culturelle favorite concernant le vin ?
« Qui sait déguster ne boit plus jamais de vin mais goûte ses secrets. » Salvador Dali
Avez-vous un accord met et vin, avec l’une de vos cuvées, à nous conseiller ?
« Un plat à base de homard se marierait bien avec un Renard Blanc : un vin blanc complexe et légèrement boisé. Ca donne un accord à la bourguignonne.
Sinon, le Petit Verdot fonctionne très bien avec les abats. Une brochette de cœur, pourquoi pas du pigeon. Des plats dans la pure tradition de la cuisine française, qui reviennent sur le devant de la scène bistronomique, très tendance. »